La leishmaniose viscérale : risque d'émergence chez l'homme
Faye Babacar1, Sylla Massila Wagué2, Banuls Anne-Laure3, Niang Abdoul Aziz2, Ndiaye Jean Louis1, Tine Roger Clément1, Sylla Khadime1, Sow Doudou1, Dieng Yémou1, Gaye Oumar1
1Service de Parasitologie – Mycologie, Faculté de Médecine, Université Cheikh Anta Diop Dakar Sénégal
2Laboratoire de Zoologie des Invertébrés Terrestres, IFAN, Université Cheikh Anta Diop Dakar Sénégal
3Laboratoire MIVEGEC (UMR IRD 224-CNRS 5290-Université Montpellier 1) Montpellier, F-34394, France.
Au Sénégal, un foyer de leishmaniose cutanée avait été décrit il y a plus d'une trentaine d'années dans la région de Thiès, situé à 70km de la capitale. Cette étude vise à comprendre l'épidémiologie de la forme viscérale dont toutes les composantes (parasite, vecteur et réservoir de parasite) sont présentes dans cette zone.
Une étude longitudinale parasitologique, sérologique et moléculaire a été menée sur le site pour étudier l'épidémiologie de la maladie chez l'homme, la dynamique des populations du parasite, des vecteurs et du réservoir du principal qui est le chien. L'étude d'une coinfection avec le VIH a également été effectuée chez les personnes vivant avec le VIH (PVVIH) et habitant la région et aux alentours.
Une forte prévalence de la leishmaniose canine (45%) et un pourcentage supérieur à 30 % de personnes séropositives vivant autour des chiens a été retrouvée. Une PCR diagnostique réalisée a montré que l'agent pathogène est Leishmania infantum. Une séroprévalence de 18% (14/76) a été trouvée chez les PVVIH dont plus de la moitié (8/14) résidaient en dehors de la zone de Mont Rolland Aucun cas clinique n'a été rencontré. Sur le plan entomologique, 3654 individus ont été capturés dont 54 appartenant au genre Phlebotomus et 3600 au genre Sergentomya. L'analyse parasitologique et par PCR a isolé pour la première fois la présence de L infanttum uniquement chez les individus du genre Sergentomya (5.38 % pour S. dubia, 4.19 % pour S. Schwetzi et 3.64 % pour S. magna). Les analyses statistiques montrent une relation significative entre la positivité de S. schwetzi et la séroprévalence chez les chiens et entre la positivité des individus toute espèce confondue et la séroprévalence humaine. Ces résultats montrent que la transmission de la leishmaniose est bien implantée dans cette région et un contact fréquent entre les populations humaines avec un risque important d'émergence chez l'homme.